Le prix des matières premières, un risque comme un autre
Si la liste des impondérables en agriculture est déjà longue, le risque que fait peser le prix des matières doit lui aussi être maîtrisé.
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Les dernières campagnes ne le démentent pas, les marchés des matières premières agricoles sont prompts à tous les changements brutaux, dans un sens comme l’autre. Pour une exploitation agricole, l’impact économique peut s’avérer dévastateur en cas de mauvaise décision. Car si le risque zéro n’existe pas, il peut être atténué par des précautions et des stratégies adaptées. Samuel Le Grand, ingénieur au sein du pôle des études et prospective du CER France Bretagne rappelle les fondamentaux avant de réfléchir à commercialiser. « Il faut naturellement connaître ses volumes à commercialiser, mais aussi son point d’équilibre grâce au calcul de ses coûts de production », souligne-t-il. « Lorsque le coût de revient est couvert par un prix de marché, je sécurise mon revenu. » Si ces éléments peuvent sembler être la base, la recherche du meilleur prix possible peut parfois conduire à les négliger.
Si aucun outil ne protège complètement du prix bas, la prise de risque peut être atténuée. Samuel Le Grand observe que les organismes stockeurs (OS) tentent de proposer une solution pour tous les cas. « L’offre des coopératives et des négoces a beaucoup évolué ces dernières années. Ils cherchent à proposer des solutions pour plusieurs niveaux de prise de risque », précise-t-il. Du prix de campagne au prix ferme, avec la possibilité de vendre avant ou après récolte, avec ou sans stockage à la ferme… Les options sont nombreuses. « Aujourd’hui, une majorité de nos adhérents tendent à vendre à la récolte, perçoivent un acompte et des compléments au cours de la campagne », précise-t-il. Reste que pour offrir ces solutions, les OS ne sont pas sans filets.
Les marchés à terme, la gestion du risque prix avant tout
Pour eux comme pour certains agriculteurs formés, il est possible d’aller directement sur les marchés à terme. Ces derniers sont connus pour donner de la visibilité sur les prix marchés des matières premières mais restent un bon moyen de se protéger des variations. Spéculation, volatilité, financiarisation… La liste des griefs à l’égard des marchés à terme des produits agricoles est connue mais n’atténue en rien leur rôle principal dans la maîtrise des risques de variations des prix, indispensable à toute la filière. La bonne compréhension de leur fonctionnement reste la clé pour en tirer tous les bénéfices. « Nous avions formé des producteurs il y a une dizaine d’années pour les utiliser mais très peu y sont allés. Les OS ont rapidement étoffé leurs offres pour répondre à cette demande », ajoute Samuel Le Grand.
Le marché à terme est donc l’espace d’échange de contrats à terme qui régissent des transactions de marchandises à des échéances de livraison futures. Dit autrement, ils permettent l’achat ou la vente de produits agricoles qui ne sont pas encore produits et ainsi de s’éviter l’exposition à l’incertitude de l’offre et de la demande au jour le jour sur le marché physique. Si une part infime de ces contrats débouchent effectivement sur des transactions physiques, ils sont basés sur des critères au plus près des réalités du marché.
On y retrouve des critères de qualité du produit par rapport à leur utilisation principale. Pour le blé, le poids spécifique, le taux de protéine, le temps de chute de Hagberg ou encore l’humidité et les impuretés sont calquées sur un produit destiné à la panification. Pour le maïs, ils correspondent à la qualité demandée en alimentation du bétail. Pour le colza enfin, ce seront les besoins pour la trituration qui sont demandés, notamment leur teneur en huile.
Autre point important du contrat, les mois d’échéance. Il s’agit de la date de livraison théorique à laquelle les contrats se réfèrent. Dans les faits, c’est plus souvent la limite de temps pour acheter ou vendre ce contrat, avant de se retrouver dans l’obligation de l’exécuter. En cas d’exécution justement, chaque contrat comporte une liste de points de livraison liée au produit. Les ports de Rouen, Dunkerque ou Montoir par exemple en blé meunier, des points de chargement de barges du Rhin en colza ou des silos de La Rochelle ou Blaye en maïs.
Élément crucial du contrat lorsque l’on souhaite l’utiliser uniquement pour de la gestion du risque prix, la quantité. Pour les produits agricoles cotés sur le Matif en France, chaque contrat équivaut à 50 tonnes.
Un miroir du marché physique
Si l’utilisation des marchés à terme ne garantit pas un prix élevé pour le vendeur ou bas pour l’acheteur, il peut permettre de fixer son prix dès qu’un niveau satisfaisant pour l’opérateur est atteint. Pour cela, il faut que les opérations sur les marchés à terme soient inverses à celle du terrain, c’est-à-dire le marché physique. Quand un prix objectif est atteint, un producteur de céréales qui anticipe sa production va ainsi pouvoir vendre sur le marché à terme via des contrats, le volume équivalent. Au moment d’effectivement vendre et livrer sa marchandise à son organisme stockeur, il devra alors racheter le ou les contrats qu’il avait précédemment vendu sur le marché à terme et retrouver une position neutre. Les transactions sur les marchés à terme comportent les avantages d’être transparentes, avec des cotations quotidiennes et connues de tous, mais aussi d’être suffisamment « liquides » pour que tous les opérateurs, petits ou gros, parviennent à tout moment à trouver une contrepartie acheteuse ou vendeuse et éviter le risque de devoir exécuter un contrat.
Les options en option
La couverture du risque stricte sur les marchés à terme constitue l’utilisation basique de cet outil. Pour une utilisation plus avancée, il existe la possibilité d’utiliser des options. Ces options fonctionnent comme des assurances, avec le coût associé. Deux types d’options existent. Le « call » qui est en fait un droit à acheter des contrats à terme ou le « put », qui donne, lui, le droit de vendre des contrats à terme, les deux moyennant une prime. Une multitude de stratégies existent pour profiter des opportunités de marché à condition d’être à même de dégager le temps nécessaire pour suivre les marchés. Dans tous les cas, il est bon d’être accompagné d’un conseiller car à l’opposé de la grande majorité des contrats proposés par un OS, cette solution peut présenter des risques financiers importants.
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